1. Les IDE se sont améliorés de 13,9% à fin novembre 2021. Comment s'explique cette performance ?
Cette augmentation s'inscrit dans un contexte de reprise économique, dans lequel les différents investisseurs avaient anticipé une augmentation de la demande adressée à notre pays. Il faut rappeler que malgré la récession de 2020, les flux des IDE n'ont connu qu'une légère contraction, à l'opposé d'autres pays de la région qui étaient beaucoup plus sensibles à ce choc.
Ainsi, les autorités économiques du pays ont contribué de manière significative à cette résilience, en envoyant plusieurs signaux aux investisseurs, aussi bien sur plan sanitaire qu'économique.
Sur le premier volet, la gestion était exemplaire à plusieurs égards, notamment au niveau de la vaccination qui avait démarré très tôt. D'ailleurs, aucun reconfinement n'a été déployé après la première vague, ce qui a assuré la continuité de l'activité, en particulier dans le secteur industriel.
Sur le plan économique, les autorités ont déployé une batterie de mesures, aussi bien conjoncturelles que structurelles, notamment la création du Fonds Mohammed VI pour l'investissement, ayant sans doute rassuré les investisseurs sur les perspectives économiques du pays.
2. Quelles sont les mesures à prendre pour encourager davantage les IDE ? Malgré la résilience des IDE, leur part dans la production reste en deçà du potentiel du Royaume. Il faut donc rattraper cet écart et saisir les opportunités du monde post-covid, dans lequel le Maroc doit intégrer les nouvelles chaînes de valeur.
Cela passe à mon sens par trois leviers: juridique, économique et promotionnel.
Pour le premier, il faudra mieux organiser et faciliter l'accès aux différentes règles juridiques et de la réglementation, avec le renforcement du rôle de "conseil" des guichets uniques.
Il est aussi essentiel d'améliorer l'efficience des décisions publiques, en réduisant, entre autres, les délais de la publication des décrets d'application des différentes lois promulguées.
Sur le plan économique, il est essentiel de libérer graduellement le compte capital, tout en développant la capacité exportatrice du pays, dans le but de fournir davantage de garanties aux investisseurs.
Il est également essentiel d'approfondir le marché financier du pays, en développant entre autres les produits de couverture de risques, ce qui stimulera aussi bien les investissements directs que les placements de portefeuille et les prêts bancaires transfrontaliers.
Enfin, il faut développer la politique promotionnelle ciblant les différents marchés internationaux tout en renforçant le multilinguisme dans la communication institutionnelle du Royaume.
3. Quid des perspectives des ces investissements ? Les perspectives sont très positives, grâce à la dynamique créée par le Royaume, depuis les années 2000, à travers l'édification de plusieurs grands chantiers d'équipement, à l'instar des infrastructures et des grandes zones industrielles.
Cela a favorisé la création de grandes unités de production comme l'usine "Renault" à Tanger. C'est ainsi que le secteur industriel, tiré par l'industrie automobile, a joué un rôle capital dans l'attraction des IDE durant la dernière décennie, avec une part croissante dans ces flux qui a presque quadruplé en 10 ans.
Cette dynamique a vocation à s'accélérer après deux événements majeurs de l'année 2021. D'abord la présentation du nouveau modèle de développement (NMD), qui offre une perspective de long terme aux investisseurs sur les ambitions du Royaume.
Ensuite, la formation du nouveau gouvernement qui compte dans ses rangs de grandes compétences, qui j'espère, sauront insuffler de nouvelles pratiques de gouvernance.
D'ailleurs, il faut saluer deux initiatives s'inscrivant dans cette dynamique: la création de la marque "MoroccoNow" qui a pour but de faire connaître les ambitions du Royaume en matière d'investissements internationaux, ainsi que l'initiative "MoroccoTech" qui veut faire du pays une vraie "Digital Nation" pour les investisseurs.
4. Quels sont les freins qui pourraient entraver l'évolution des IDE ? Les réglementations des pays émetteurs constituent la plus grande menace sur les investissements étrangers, principalement à travers les questions d'harmonisation fiscale et les réglementations environnementales. Il faut donc rester vigilant et avoir une stratégie d’anticipation par rapport à ces transformations.
Concernant le premier point, le Royaume semble être conscient de cette convergence impulsée par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), et table sur d'autres leviers de compétitivité dans son modèle de développement, à l'instar de la réduction des coûts ou la transformation numérique.
Le deuxième point constitue pour nous une opportunité de taille, avec une part croissante des énergies renouvelables dans le mix énergétique du Royaume, qu'il faudra renforcer et qui doit constituer une priorité pour les pouvoirs publics.
En effet, la question environnementale devient centrale dans le mandat des institutions financières et des banques centrales étrangères, orientant de plus en plus la finance vers les projets à caractère durable.
5. Parallèlement, les IDME se sont situés à près de 16,12 MMDH à fin novembre 2021, soit le plus haut niveau atteint durant la même période au titre des cinq dernières années. Quelle est votre lecture de cette performance ? Comme pour les IDE, la progression des IDME est expliquée par la reprise économique à l'échelle mondiale, tirée par un choc de demande et une augmentation des liquidités.
Cette situation a stimulé l'appétit des investisseurs et une reprise des flux de capitaux. Cela n'a pas épargné les entreprises marocaines, très présentes à l'échelle internationale, avec une forte présence dans le continent africain et dans le secteur bancaire.
6. Quelles sont les perspectives d'évolution des IDME ? Les IDME ont vocation à progresser dans les prochaines années à cause de la nouvelle orientation de la politique monétaire du pays. Celle-ci se dirige vers un cadre dit de "ciblage d’inflation" qui s'accompagne à moyen terme de la flexibilisation du régime de change et la libéralisation du compte capital.
Cela permettra d'atteindre à terme une parfaite flexibilité des mouvements de capitaux et de plus grandes marges d'ajustement pour les investisseurs, créant de nombreuses opportunités pour les investissements des entreprises marocaines.
A ce titre, le Maroc franchit une nouvelle étape dans ce processus, avec l'introduction par l'Office des changes, de nouvelles mesures de libéralisation et d'assouplissement des opérations courantes et en capital, incluant par exemple, l'augmentation, à 200 millions de dirhams, du plafond des transferts annuel au titre des investissements à l'étranger.
Cela présage une plus grande participation des entreprises marocaines dans le marché international et une plus grande attractivité pour les investissements étrangers dans le pays.
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